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Guinée : Les véritables défis et enjeux de la filière avicole...

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L’aviculture guinéenne traditionnelle ou moderne demeure une activité économique largement pratiquée par la population. Elle est basée essentiellement sur l'élevage de poules pondeuses. Les poussins sont soit importés ou issus des couvoirs locaux.  

Malgré les efforts des producteurs locaux, les aviculteurs guinéens font face à d’énormes contraintes liées notamment au manque de financement, à l’approvisionnement en aliments de volailles et surtout à la concurrence « déloyale » des importations de la viande de poulet. Sans pour autant occulter les multiples difficultés rencontrées dans le cadre du foncier, où l’Etat a toujours joué un très mauvais rôle.

La filière avicole guinéenne en perpétuelle souffrance

L’aviculture guinéenne reste encore sous le poids de l’importation de poulets surgelés. Selon les Statistiques de la Direction Générale des douanes, en 2017, '' la Guinée a importé plus de 30 000 tonnes de poulets'’.

Pour renverser cette tendance, Alpha Condé s’est engagé dans son Programme de Gouvernance 2020-2026 à ‘’développer l’aviculture pour mettre fin à l’importation de poulets et générer des revenus pour les jeunes entrepreneurs guinéens’’.

Cette nouvelle promesse vient s’ajouter à d’autres déjà prises en 2015 par le Président de la République et son Gouvernement, mais qui, malheureusement n’ont jamais été mises en œuvre. 

Les résultats du rapport global d’évaluation des promesses 2015-2020 du Président Alpha Condé et de son Gouvernement ont démontré que dans le secteur Pêche et élevage, seulement 3% des promesses ont été réalisées, soit 1 engagement sur 32. Aussi, plus de la moitié ( 53% plus exactement) des promesses dans ce secteur n’ont pas été réalisées.   

Dans ce dernier lot, nous pouvons citer la promesse de ‘’Construire une usine d'alimentation du bétail à Bouliwel ( Mamou)’’ et celle de ``Construire un abattoir moderne à Kagbelen’’.   

 Pour atteindre le nouvel objectif dans ce secteur que l’Etat s’est fixé pour les six prochaines années, il faut  des actions concrètes qui apportent directement un appui aux producteurs avicoles du pays. Cela passe par la formation et l’encadrement des aviculteurs en technique d'élevage, la promotion des aviculteurs locaux, la facilité dans l’accès au crédit, le soutien financier des micro-projets avicoles viables par le Gouvernement etc. 

Certes, il existe des producteurs locaux qui détiennent les moyens nécessaires pour pratiquer pleinement une aviculture moderne, mais sans l’aide de l’Etat ils auront du mal à s’en sortir véritablement. Faire un gros investissement dans ce sous-secteur en Guinée de nos jours, constitue un très grand risque. 

Les aliments de volailles, un casse-tête pour les producteurs…

L’approvisionnement en aliments de volailles constitue l’une des plus grandes contraintes auxquelles les producteurs locaux font face au quotidien. Cela se matérialise  par la hausse vertigineuse du prix des œufs et du poulets sur le marché guinéen suite à la fermeture actuelle des frontières de la Guinée avec le Sénégal, jusque-là le principal pays d’approvisionnement des aviculteurs guinéens en aliments de volailles. 

En guise d'illustration, le prix d'un kilogramme de poulet est passé de 25 000 GNF en 2019 à près de 40 000 GNF en 2021.

Il convient aussi de rappeler que dans son projet de société 2015-2020, Alpha Condé s’était engagé à ‘’mettre en place une chaîne d’approvisionnement d’aliments de volailles’’. Cinq ans après, cette promesse n’a connu aucun début de matérialisation. 

À celle-ci s’ajoute l’engagement du Chef de l’Etat et son Gouvernement dans l’ancienne gouvernance à ‘mettre en place des unités de conditionnement et de conservation de produits avicoles (poulets de chair et œufs)’’. Cette promesse rejoint aussi la longue liste des projets « imaginaires » qui stagnent toujours dans leur phase embryonnaire. 

Produire 25 millions de poulets par an, un défi stratosphérique…

Malgré tout, le Président de la République a déclaré récemment, lors d’une entrevue qu’il a tenue avec les cadres du Ministère de l’élevage et des partenaires techniques et financiers à Sékhoutouréya, que ‘’la Guinée importe de nos jours 25 millions de poulets par an’’

Ainsi, pour réduire cette dépendance des poulets importés, Alpha Condé a annoncé par la même occasion que la Guinée a reçu des partenaires (des Marocains, selon une source bien informée) qui vont accompagner le pays pour la production de ‘’25 millions de poulets par an, en 5 ans’’, dit-on. Une promesse qui vient déclasser par une grande marge ses précédentes promesses dans le secteur. 

Par ailleurs, au lieu de se tourner vers des étrangers qui ne connaissent pas bien les réalités de l’aviculture guinéenne, le Gouvernement devrait plutôt s’atteler à trouver des voies et moyens pour permettre aux producteurs locaux de rehausser leur niveau de production, surtout en favorisant l’accès aux crédits et la réglementation du marché de l’importation des poulets pour leur permettre de mieux rentabiliser leur activité.

Les enjeux fonciers, le carcan qui freine l’aviculture…

Il faut aussi souligner les problèmes fonciers qui freinent indéniablement le développement de la filière avicole dans notre pays. Le dernier en date, c’est la tentative brusque par les autorités guinéennes de récupérer le domaine agricole où est implantée la ferme avicole Malaisie, à Dubréka, en novembre 2020, qui regorgeait plus de 50 000 têtes de poules.

Alors que cette ferme, à elle seule, ravitaille la préfecture de Dubréka, plusieurs marchés de Conakry et même certains pays limitrophes en œufs. En plus, plusieurs autres investisseurs se voient souvent contraints à délocaliser leurs installations dû à certaines exigences de l’urbanisation d’une part, et de la mauvaise gestion des domaines de l’Etat d’autre part. 

Par conséquent, si le Président Alpha Condé et son Gouvernement ambitionnent réellement de développer l’aviculture en vue de mettre fin à l’importation gigantesque de poulets et faire du secteur un véritable pourvoyeur d’emploi pour les jeunes, il faudra donc entre autres, chercher à réaliser les projets déjà existants qui trainent dans les buffets de l’Administration. 

Ensuite, mettre en place une stratégie efficace pour encourager et accompagner financièrement les investisseurs locaux. Mais, miser aveuglément sur des partenaires étrangers ne semble pas être la solution adéquate pour relancer conséquemment cette filière.

Enfin, il faut oser signaler que le département chargé de l’élevage est en manque réel de personnel qualifié pour apporter aux producteurs des assistances techniques et des conseils pour booster efficacement le secteur. L’heure n’est plus aux promesses douteuses !


Cet article a été produit avec notre collaborateur externe, Mamadou Alpha Baldé, journaliste agricole.  

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